Biométrie pour l'armée du Congo

Publié le par Coordination contre la biométrie

La biométrie pour réorganiser une armée indisciplinée en RDC ?
Reuters 27.09.07 | 18h05


Par Joe Bavier

KINSHASA (Reuters) - La République démocratique du Congo veut mettre en place, avec le concours de l'Union européenne, un nouveau système de cartes d'identité biométriques afin de réorganiser son armée, réputée pour son indiscipline et pour sa brutalité.

Pendant des années, les forces armées congolaises n'ont été qu'un instrument de répression entre les mains du maréchal Mobutu Sese Seko, et après la guerre qui a ravagé l'ancienne colonie belge de 1998 à 2003, elles sont devenues ingérables et corrompues.

Des responsables onusiens et des ONG comme Human Rights Watch accusent les militaires de viols, de pillages, d'exécutions sommaires, en particulier dans l'est du pays, à proximité des frontières rwandaises et ougandaises où sévissent de nombreux groupes rebelles.

Le système de cartes d'identité biométriques, relancé la semaine dernière, pourrait permettre au gouvernement du président Joseph Kabila de savoir avec précision où se trouvent ses forces armées, et dans quelle proportion, ce qui pourrait constituer un premier pas vers une protection efficace des civils.

"La seule façon de réduire et de mettre fin à ces abus est de ramener les soldats dans les casernes, de leur faire vivre une vie classique de militaire", a déclaré à Reuters le général Dieudonné Kayembe, chef d'état-major congolais.

"Avec les commodités qu'apporte la biométrie", nous allons pouvoir envisager de reconstruire des casernes", a-t-il poursuivi.

RECENSEMENT DES FORCES

Selon de nombreux observateurs, un échec de la réforme de l'armée ferait peser des risques majeurs sur la stabilité de l'ex-Zaïre.

Le moral de l'armée est au plus bas, la solde insuffisante et trop rarement versée, et les officiers supérieurs ont pris l'habitude d'empocher la paie de "soldats-fantômes" qui n'existent que sur leurs registres.

"Nous souffrons", a déclaré un soldat à Reuters. "Nous ne gagnons que 14.500 francs congolais (18 euros environ) par mois. On ne peut pas vivre avec ça. Nous avons des familles, et nous attendons toujours la paye de ce mois", a-t-il poursuivi sous couvert d'anonymat, par peur de représailles.

Envoyés sur place pour aider l'armée congolaise à s'organiser, des conseillers militaires européens font face à une tâche qui paraît insurmontable.

"On nous a demandé de trouver un moyen de payer les soldats", explique le général français Pierre-Michel Joana, qui dirige l'Eusec (Mission européenne chargée de la réforme du secteur sécuritaire en RDC). "Mais nous nous sommes vite aperçus que c'était toute l'administration qui avait besoin d'être réformée.

C'est à cette fin que la RDC a entrepris cette année, avec l'appui de l'UE, un vaste recensement de ses forces.

Chaque soldat se verra remettre une carte d'identité dans laquelle sera insérée une puce qui contiendra, outre une empreinte digitale, des informations telles que le grade, l'âge et la situation familiale.

"Même dans l'armée française, nous n'avons pas cela", souligne le général Joana, ancien commandant de l'opération "Licorne" en Côte d'Ivoire.

L'objectif est d'établir les effectifs exacts de l'armée, l'identité des soldats, et de pouvoir les localiser afin qu'ils soient payés avec régularité. Ces données peuvent également être utilisées pour améliorer le commandement, ce qui permettra, espèrent les responsables, de ramener l'armée congolaise à des normes internationales.

Cette initiative ne convainc pas tout le monde.

La capacité de l'armée à conserver les lecteurs de cartes en état de fonctionnement dans des casernes ravagées fait débat, de même que la capacité des soldats à ne pas égarer leurs cartes d'identité.

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